Georges Di Lallo est un passionné de cinéma et est un auteur récurent de cette collection, puisqu'il a écrit aussi des biographies sur Dean Martin: (2011), Errol Flynn (2013), Robert Redford (2014) et tout récemment Kirk Douglas (2019).
On connait aussi son nom car en collaboration avec Patrick Brion qu'on ne présente plus, pour le même éditeur, il a aussi écrit les deux tomes de l'ouvrage Le Train fait son cinéma (respectivement parus en 2012 et 2015), ainsi que Et vogue le cinéma (2016) dans lequel il répertoriait déjà la présence de bateaux dans des dizaines de films.
Pour Marine, guerre et cinéma, Di Lallo œuvre en solo, et évoque les rencontres entre le cinéma et la marne de guerre. A priori, si vous aimez les navires et le cinéma évoquant la guerre, ce livre est fait pour vous.
Oui, mais...
Le livre balaye environ 90 ans de cinéma, débutant par Le Cuirassé Potemkine de Sergueï Eisenstein (1925), et finissant par le Dunkerque de Christopher Nolan sorti en 2017. Entre les deux, dans les 135 films évoqués, en 256 pages, enfin un peu moins, car il faut enlever le remplissage, de la préface pas très utile de l'amiral Coldefy, président de l'Académie de Marine, l'avant propos et les photos inutiles (j'y reviendrai).
L'auteur utilise la formule Brion, c'est-à-dire une évocation chronologiques de films sur un genre dédié, avec une fiche plus ou moins courte (et je n'ai pas écrit longue sciemment) par film.
Si le feuilletage du livre est intéressant, j'ai trois grosses critiques à formuler.
- La plus gênante est la brièveté des présentations. L'ouvrage est très illustré, en couleurs et noir & blanc, truffé d'images des films, captures (très nettes) ou photos d'exploitation. C'est peut-être apprécié, moi je trouve que c'est un défaut, surtout proposées de cette manière, car c'est fait au détriment du texte. D'autant que parfois, nous avons droit à une double page de photos, et, franchement, quel intérêt de montrer autant de photos de films aussi connus que Apocalypse now ? Il aurait été, à mon avis, plus bénéfique de poser le contexte historique des faits évoqués dans les films cités, car il me semble qu'il n'est techniquement ni thématiquement pas aberrant de croiser Histoire et cinéma.
- L'autre grosse critique est le choix des films. Si l'ouvrage débute bien dans son thème, on détecte vite des anomalies, ou du moins des incongruités dans le choix des films présentés. Par exemple, après des années 1920-30 rapidement expédiées, on entre rapidement dans les productions guerrières américaines produites durant la seconde guerre mondiale. Si les classiques sont bien présents, on se demande ce que des films comme Retour aux Philippines ou Le Commando de la mort viennent faire dans un livre sur la marine en guerre. Bien-sûr c'est une minorité, même si on aurait pu éviter d'autres titres comme L'Allée sanglante, Le Pont de la rivière Kwaï ou Les Commandos passent à l'attaque qu'on ne peut pas vraiment appeler des films marins... On tique aussi sur la présence de films comme Panique à bord d'Andrew L. Stone, pas du tout film de guerre, d'Exodus (encore que, bon, allez, ok), Les Cannons de Navarrone ou Trahison sur commande. Mais le pompon, c'est la présence hors-sujet de films comme Pas de lauriers pour les tueurs, Le Rideau déchiré (et ce dernier a en plus droit à une double page de photos, comme si c'était un titre important du thème abordé), ou Un pont trop loin (ah oui, y a des barques... ). On a régulièrement l'impression que parfois, seules les présences d'un bateau et d'un uniforme, même quasi furtives, ont suffit pour qu'un titre fasse partie de la sélection. Alors certes, ça amène ainsi des titres plus connus et grand public, mais ça n'a rien à voir avec le sujet sensé être analysé. Et ça se voit encore plus dans la sélection de films récents, comme La Ligne rouge, Black book, Tu ne tueras point ou le moins connu Company K ! Il y avait pourtant des films plus en phase avec le thème choisi, comme, en vrac, Les Chemins de la dignité (2000) avec Robert De Niro, le bourrin Piège en haute mer (1992), Entre les mains de l'ennemi (2004), le doc cinéma Victoire en mer (1954), Le Sillage de la mort (1953), Phantom (2013) avec Ed Harris...
- Enfin, mais finalement ça rejoint la critique précédente, l'auteur n'est pas sorti des sentiers battus, et propose principalement des films anglo-américains, et tous les classiques du genre, avec quelques touches européennes (essentiellement allemandes et français, mais rien de bien original non plus). Pourtant, des films comme le sud-coréen Phantom: The Submarine (1999), les japonais Yamato ou Lorelei (2005), le russe L'Amiral (2008), les italiens Sous dix drapeaux (1960) ou Torpilles humaines (1954), le français Feu ! (1926), les britanniques Le Navire en feu (1943) ou Commando dans la Gironde (1955), les allemands U47 - Scapa-Flow ou UB 55, Corsaire de l'océan (1957)... avaient plus leur place dans la sélection que certains présents dans le livre. La plupart pas difficiles à trouver en plus.
Au final, on a une compilation de titres de films en rapport avec la marine militaire, parfois hors-sujet, abondamment illustrée, mais peu détaillée. Il y a tout de même des films assez rares (j'ai été agréablement surpris par la présence de Commando sur le Yang-Tsé par exemple, ou de L’Île du danger), et c'est très bien imprimé même si on peut regretter le format broché. Un projet intéressant mais inabouti à mes yeux.
Marine, guerre et cinéma - Georges Di Lallo - Éditions Riveneuve - Broché - 256 pages - 21,5 x 28,5 cm - 34,00 € chez l'éditeur.